Le parc national de la Gaspésie est promesse de magnifiques paysages vallonnés sur le centre de la Gaspésie. Pour les admirer, il va falloir les mériter et enchaîner de nombreux kilomètres de montée raide !
Mardi 13 Juillet – De 12 kms à 18 kms sur un coup de tête
Notre premier réveil au parc national de la Gaspésie est un réveil comme on les aime : il est 6 heures et un soleil du matin doux nous réchauffe gentiment quand on sort de la voiture. Les oiseaux chantent, l’air est frais et vivifiant et nous découvrons plus amplement notre spot, découvert hier au crépuscule. Des matins comme celui-ci, nous pourrions en vivre tous les jours ! 😜
Mais pas le temps de traîner, car aujourd’hui est une grosse journée (même si nous ne savons pas encore à quel point !). Après maintes et maintes délibérations, hésitations, négociations et changements d’avis, nous avons choisi LE mont, parmi tous les monts du parc (et il y en a beaucoup !) que nous voulons gravir aujourd’hui.
Nous quittons notre spot de bonne heure et nous installons directement sur le parking de départ de la randonnée pour prendre notre petit-déjeuner. Il est 6h30, il n’y a pas un chat, le soleil nous réchauffe de ses timides rayons de début de journée et notre réchaud tourne à plein régime, brisant la quiétude ambiante de son bruit d’hélico. Œufs brouillés et bacon, de quoi nous tenir au corps pour la rude montée qui nous attend !
🥾 Sentier Le Tour du Mont Albert – 17,8 kms – 850 m de dénivelé
Lorsque nous partons pour la randonnée, frais et motivés, nous ne savons pas encore que nous partons pour 18 kilomètres. Nous avons simplement prévu de gravir le Mont Albert, une marche aller-retour de « seulement » 12,6 kms.
Le sentier est désert lorsque nous entamons les premiers mètres de dénivelé. Nos bâtons cliquent sur les graviers et nous avançons d’un bon pas. Très vite, nous prenons de la hauteur et les premiers paysages qui s’offrent à nous sont déjà magnifiques.
Nous montons ainsi pendant plus de 2 heures, sur un sentier de plus en plus raide et de plus en plus accidenté. Nous scrutons les bois à la recherche d’un orignal car nous savons que de nombreux randonneurs en voient sur ce sentier.
Après plus de 2 heures de marche, nous sommes contents de voir la forêt céder sa place à un paysage plus dégagé. Nous atteignons enfin le plateau dénudé de 13 km2 au sommet du Mont Albert. De là, le paysage sur la vallée est à couper le souffle !
Malgré les moustiques qui nous assaillent de toute part, nous prenons le temps de manger quelques noix et fruits secs (le kit du parfait randonneur !) en admirant le paysage. Puis nous décidons de pousser jusqu’au prochain belvédère. Nous traversons le plateau balayé par les vents et dénudé de toute végétation sur une passerelle en bois qui permet de préserver l’écosystème.
Au belvédère, nous nous trouvons face à un panneau qui nous fait hésiter. Il indique que la randonnée Le Tour du Mont Albert continue tout droit. Elle représente 8 kms et est jugée « plus difficile » que de redescendre par là où nous sommes montés, ce que nous avions prévu de faire. Vue d’en haut, la pente est en effet très raide et bien caillouteuse. Nous hésitons un peu. Redescendre par ce côté de la montagne signifie marcher 5 kms de plus que ce que nous avions prévu, et nous en avons déjà pas mal dans les pattes ! Mais nous n’avons pas envie de refaire le même chemin qu’à l’aller, alors on se lance !
Comme prévu, la descente est ardue… Mais magnifique ! La tension est forte sur les genoux et sur les chevilles. Nous marchons de rochers en rochers et la moindre glissage pourrait être dangereuse. Le sentier n’est que roches et gros cailloux et les quelques passages où il devient plat, nous en profitons pour accélérer la cadence.
Nous nous arrêtons à l’ombre, près d’une rivière, pour manger. L’occasion parfaite pour se rafraîchir, sauf que l’eau est glacée ! Du genre à brûler la main quand on la met dans l’eau. Après une brève pause, nous repartons, car la route est encore longue, environ 6 kms. Le sentier est toujours très accidenté et longe la rivière. Nous scrutons les alentours à la recherche d’un orignal, qu’on désespère de voir.
Les derniers kilomètres sont durs. La descente permanente nous épuise et est exigeante pour les genoux. Nous débouchons sur un belvédère offrant un magnifique point de vue sur la chute du Diable puis, plus loin, sur la chute Sainte-Anne.
Finalement, les 2 derniers kilomètres sont les plus durs. Nous avons chauds, rêvons de boire une boisson bien fraîche, de poser nos sacs à dos et d’enlever nos chaussures ! Heureusement, le sentier est enfin plat et nous accélérons le rythme. Le centre de service est en vue !
Nous nous y arrêtons, épuisés mais heureux de notre journée, car nous souhaitons tenter d’obtenir un emplacement de camping pour la nuit. L’idée d’avoir accès à un emplacement rien qu’à nous, avec une table de pique-nique, des toilettes et des douches, pour pouvoir nous poser tranquillement pour la soirée est plus que tentante ! Malheureusement, tout est archi complet. Au moins, nous avons notre spot tout trouvé pour dormir : celui de la veille !
Nous partons tout de même au camping pour prendre une douche. Les emplacements, chacun dans leur bosquet, à l’ombre, nous font rêver, mais ce sera pour une prochaine fois. Nous prenons une douche fraîche revigorante ! Un petit peu de vaisselle. Un petit peu de rangement dans notre intérieur (l’organisation, c’est la clé !). Puis nous retournons au centre de service pour demander un emplacement (sait-on jamais). Encore raté, tout est toujours complet.
Il est encore tôt et nous savons où dormir, alors nous décidons de parcourir un peu le parc en voiture pour admirer les beaux paysages et rejoindre un lac, dans un coin reculé du parc, pour notre repas du soir. Le chemin pour accéder au lac Cascapédia est accidenté et poussiéreux et, lorsque nous arrivons au camping du coin, bien isolé, JP est passé du noir au gris.
L’accueil est toujours ouvert et nous faisons une ultime tentative : toujours pas de chance, tout est encore et toujours complet dans l’ensemble du parc. Tant pis. Nous nous installons face au lac, dans le jour déclinant, et nous dégustons nos wraps tout en cuisinant notre salade de riz du lendemain.
Lorsque nous quittons le camping, le soleil se couche, nous offrant de splendides couleurs.
Le temps de redescendre jusqu’à la route principale, il fait sombre, et le temps de s’arrêter au camping pour faire une petite toilette avant d’aller au lit, c’est la nuit noire. Nous roulons prudemment sur les longues routes droites et obscures du parc. Au loin, une voiture arrive en face et, dans la lumière de ses phares, nous distinguons une forme sur la route. D’immenses pattes. Rémi ralentit immédiatement. La voiture en face arrive à toute allure. Tandis qu’elle s’approche, nous distinguons de plus en plus une forme immense en train de traverser la route : un orignal ! Au bout de quelques secondes, l’évidence : la voiture d’en face ne ralentit pas du tout et n’a très certainement pas vu l’orignal, en plein milieu de la route ! Nous sommes arrêtés, on retient notre souffle. Les pattes avant de l’animal sont sur la ligne blanche au milieu de la route, l’autre arrive à toute allure, je ferme les yeux. La voiture passe comme une flèche à côté de nous et continue sans se rendre compte de rien. Il n’y a pas eu de choc. J’ouvre les yeux. L’orignal s’est figé. Il est immobile, au milieu de la route, si grand que les phares de JP (pourtant bien hauts), n’éclairent pas sa tête. J’ai le cœur qui bat à mille à l’heure. C’est passé si près que l’orignal a dû laisser un peu de bave sur le pare-brise de l’autre voiture ! Impossible de comprendre comment l’autre conducteur n’a pas pu le voir…
Soit en état de choc (comme nous), soit aveuglé par nos phares, il ne bouge pas et nous avons tout le loisir de l’observer de près. Nous ne pensions pas que c’était si grand, si imposant, si musculeux, un orignal ! Magnifique ! Nous sommes vraiment impressionnés par sa taille. Finalement, au bout de longues minutes, il fait doucement demi-tour. Il marche un peu, s’arrête, hésite, s’immobilise. Il se tourne pour nous regarder. Puis il marche un peu. Il semble encore en état de choc. Un orignal peut-il se rendre compte d’à quel point il est passé proche de se faire percuter par une voiture ? Finalement, il s’en va, disparaissant dans le fossé sur le bas côté de la route.
Nous restons encore quelques secondes immobiles, le temps de reprendre nos esprits. Puis nous reprenons la route, encore plus doucement. On est en boucle sur l’épisode jusqu’à notre spot du soir. Il est plus de 9 heures, la nuit est noire et nous partons directement nous coucher.
Mercredi 14 Juillet – Imprévisible montagne
Nous sommes levés à 6 heures du matin. Aujourd’hui, le soleil n’est pas au rendez-vous, mais c’était prévu. C’est sous un ciel gris, mais pas menaçant, que nous levons le camp. Sur le trajet vers le parc national, les sommets alentours, que nous avons tant admirés les jours précédents, sont dissimulés par les nuages. Nous prenons notre petit-déjeuner sur le parking de départ de notre randonnée du jour. À nouveau, nous sommes seuls au monde. Pas une seule voiture aux alentours, ce qui est toujours très plaisant. Après notre petit-dej’ yaourt, muesli et bananes et thé/café, nous nous élançons sur le sentier, très agréable, qui monte en pente douce. La fatigue et les douleurs de la veille sont déjà oubliées : nous avons hâte de découvrir ce que nous réserve cette nouvelle montagne !
Il est tôt, le temps est grisâtre, il n’y a pas un chat, nous avons bon espoir d’apercevoir des animaux. Biche, caribou, orignal, ours, tout nous va !
🥾 Le Mont Xalibu – 10,6 kms – 540 m de dénivelé
Après 2,6 kms et 80 m de dénivelé franchis d’un bon pas, nous arrivons au Lac aux Américains (car découvert par 2 explorateurs américains, logique !). Il s’agit d’un cirque glaciaire avec, en son creux, un beau lac dont l’eau est réputée pour être d’un bleu pur et profond. Pour l’heure, elle reflète simplement le gris sombre du ciel, mais l’endroit n’en reste pas moins magnifique.
Nous nous élançons ensuite sur le sentier qui serpente jusqu’au mont Xalibu et son sommet. La pente est raide mais le sentier, à travers bois, agréable. Le silence de la forêt est profond et apaisant et nous scrutons les bois à la recherche d’un animal. Le grelot suspendu à mon sac à dos chante au rythme de mes pas pour éloigner les éventuels ours. Dès que nous prenons de la hauteur, chaque point de vue nous offre des vues incroyables sur la vallée et l’immensité du parc de la Gaspésie.
Lorsque nous quittons l’abri de la forêt pour entamer l’ascension finale jusqu’au sommet, nous faisons une pause pour enfiler un pull. Le vent, glacial, souffle en rafales. Malgré l’heure matinale, nous croisons deux randonneurs, bien équipés, qui descendent. De nombreux chemins de Grande Randonnée (GR) passent par le parc de la Gaspésie, dont le célèbre Sentier des Appalaches, qui se termine au nord de la Gaspésie.
Au sommet, le vent est puissant et la température glaciale. Il pleut en rafale et nous prenons à peine le temps d’admirer le paysage. Des abris de pierre ont été construits pour s’abriter. Nous en profitons pour enfiler nos vestes et k-ways.
Malgré la météo qui empire, nous décidons tout de même de pousser jusqu’au belvédère, à 200 mètres de là. La pluie s’intensifie, le vent aussi. Impossible de s’attarder pour admirer la vue. Le vent est si fort qu’il nous déstabilise. Nous avons à peine quitter le belvédère que nous sommes déjà trempés. L’eau s’infiltre jusque dans nos chaussettes.
Nous nous dépêchons de redescendre jusque dans les bois, plus abrités.
Peu à peu, la pluie se calme et nous arrivons même à faire sécher nos pantalons pendant la descente. Une bonne chose, car l’espace pour faire sécher nos vêtements est plutôt limité dans la voiture…
En arrivant à la voiture, la plupart de nos affaires sont mouillées et nous improvisons un étendoir de fortune entre les lattes du lit. Nous décidons de rouler un peu pour rejoindre des tables de pique-nique au bord de l’eau. Là, nous profitons de quelques timides rayons de soleil pour faire sécher nos affaires et pour nous réchauffer. Après mangé, nous filons au camping faire une vaisselle et prendre une bonne douche. Il est 14 heures, et il est temps de se poser LA question : What’s next ?
Nous avons deux possibilités : soit nous reprenons la route par laquelle nous sommes arrivés et nous rejoignons le fleuve pour le longer jusqu’à notre prochaine étape. Paysages incroyables garantis. Soit nous rejoignons notre prochaine étape par l’intérieur des terres, sur un chemin de terre caillouteux. Pas de vue sur le fleuve, mais aventure garantie ! Après une courte hésitation, nous optons pour la deuxième solution : on a bien envie de faire un peu de chemin !
C’est donc parti pour 60 kilomètres d’une piste de gravier rectiligne, comme le Canada en a le secret.
Arrivés à Murdochville, la « grande » ville du coin, la piste se termine. Nous prenons la route pour rejoindre le fleuve dans le but de continuer notre itinéraire en passant par la splendide et célèbre route 132, qui fait le tour de la Gaspésie. Mais nous avons à peine fait 1 kilomètre que le voyant moteur s’allume ! Qu’est-ce que c’est que ça, encore ? Nous nous arrêtons immédiatement et le verdict tombe : plus de liquide de frein ! Oh boy. On sentait bien que les freins étaient un peu loose depuis ce matin ! Hors de question de continuer sur cette route qui descend en pente plus ou moins douce vers le fleuve. Nous faisons vite demi-tour, direction le garage le plus proche de Murdochville. Il est 16h45, le garage le plus proche ferme à 17h. Nous y arrivons in extremis et faisons inspecter JP. Le suspense ne dure pas longtemps : la ligne de frein est rompue !
C’est la douche froide. À force de frotter contre un boulon mal ajusté de la nouvelle suspension, elle a fini par se rompre. On est dépités. Le garagiste, sur le point de fermer, nous propose de nous prendre demain matin à la première heure pour une réparation express. Ok ! Le hic : on ne peut pas bouger. On demande donc la permission de pouvoir passer la nuit sur le parking du garage. Permission accordée !
Commence une longue soirée. Murdochville, de son petit nom Murdoch’ (on dirait le nom d’une vieille série policière 😅) est une ville qui semble vivre du cuivre. D’ailleurs, nous sommes impressionnés par l’énorme montagne artificielle qui s’est créée aux abords de la ville à la suite des extractions de terre. Il n’y a pas grand chose à faire. Nous faisons un tour à l’office du tourisme pour utiliser les toilettes, discutons un peu avec l’hôtesse sur place, qui nous propose de nous loger dans son motel qui est dans son jus pour 100 $ la nuit (merci mais on va dormir dans la voiture !) puis nous retournons en direction du garage, croisons le garagiste (le monde est petit à Murdoch’), discutons un peu. De retour au Jeep, nous tournons un peu en rond, le moral au plus bas. Le quartier est plutôt calme, on a même droit à un mini feu d’artifice lancé par des gamins depuis le parc voisin. Nous mangeons rapidement dans la voiture et allons vite nous coucher ! Demain est un autre jour !