Nouvelle piste 4×4, nouvelle aventure ! À ces latitudes, l’hiver arrive vite ! Et une chose est sûre : la prochaine fois que l’on voudra emprunter la Ruta 41 aux portes de l’hiver patagon, on y réfléchira probablement à deux fois…
Samedi 09 mars 2024
Comme promis, la Carretera Austral nous a menés jusqu’au bout de la route chilienne, à Villa O’Higgins. Pour continuer plus au Sud, nous devons passer par l’Argentine, ce qui nous réjouit 😃 On aime bien le Chili, mais tout y est cher et compliqué. Pour preuve, le parc national Patagonia, que nous traversons pour rejoindre le poste-frontière, est gratuit côté Argentine, mais payant côté Chili : 11 000 pesos chiliens (11 €) par personne et encore 8 000 pesos chiliens (8 €) pour camper, soit 38 €. Comme toujours, le Chili nous dépouille pour nous offrir le privilège de profiter de la Nature… 😩 Le problème, c’est que l’on ne peut pas payer par carte. Après quelques minutes de négociations, le ranger accepte bon gré mal gré de nous faire une ristourne et nous déleste de tout le cash qui nous reste, soit l’équivalent de 30 €. C’est parti !
On s’élance au milieu des guanacos, cousins sauvages du lama. Dans cet immense territoire protégé, ils sont partout autour de nous, nous regardant passer d’un air inquiet.
Cependant, celui qui nous intéresse aujourd’hui, c’est le puma. Or, le parc national Patagonia est reconnu pour sa prolifération de guanacos, qui représentent 80 % du régime alimentaire du puma. Et dans le parc, il y en a, des pumas ! Plusieurs de nos amis voyageurs en ont même aperçus. C’est donc tout doucement, à l’affût du moindre mouvement, que l’on roule sur la piste du parc. Et quelle merveille, ce parc Patagonia ! On en prend plein les yeux.
Niveau puma en revanche, on n’a pas de chance. Mais ce n’est qu’en arrivant au camping du parc, 60 kilomètres après le bureau des rangers, que l’on s’aperçoit de notre erreur. En effet, il y a deux campings dans le parc. Et c’est seulement dans l’un des deux que le puma est régulièrement aperçu… mais on a choisi le mauvais ! Zut, mauvaise préparation de notre itinéraire. On hésite brièvement à faire demi-tour, mais on a déjà roulé 60 kilomètres de piste. Tant pis. On se contente donc d’une soirée fraîche au camping, ou plutôt sur le parking du camping, car on ne peut pas accéder au camping avec notre véhicule.
Dimanche 10 mars
Nos voisins de camping nous assurent que la douche est chaude. Ce n’était pas prévu, mais comment résister à une douche chaude après une nuit glaciale ? On emporte toutes nos affaires, on marche 5 minutes jusqu’au bâtiment, le tout pour s’apercevoir que la douche est à peine tiède. Soit on n’a pas les mêmes standards que nos voisins en matière d’eau chaude, soit ils ont vidé toute l’eau chaude ! 😅 On continue à rouler sur la piste du parc en ouvrant grand les yeux mais c’est toujours en vain. Le puma est bien caché (et il n’aime peut-être pas la pluie) !
C’est sous une tempête de vent et de pluie que l’on atteint Paso Roballos, le poste-frontière le plus isolé du voyage. Côté argentin, c’est rustique : pas de douaniers, mais deux militaires en treillis, pas d’ordinateur et un match de foot en fond sonore. Lorsqu’il s’empare de nos passeports français, un grand sourire éclaire son visage : « Argentina primero, Francia secundo ». Ah ! Pas la première fois que l’on nous la fait, celle-là ! 😂 Décidemment, les argentins ne nous laisseront pas oublier la Coupe du Monde de foot. Ici, rien n’est informatisé, tout se fait encore manuellement. Le jeune doit s’y reprendre à plusieurs reprises avant de correctement remplir notre permis d’importation. Après 30 minutes, tout est bon : il sort seulement pour nous ouvrir la barrière, oubliant la fouille du véhicule !
Il pleut beaucoup trop pour que l’on profite des paysages du parc national Patagonia côté Argentine. En quelques kilomètres de piste mouillée et boueuse, on repeint le Jeep jusqu’au toit. On s’installe ensuite au milieu de nulle part et on passe la soirée à guetter un éventuel puma. Sans succès, encore une fois. En revanche, le temps se découvre progressivement. On en profite pour rapidement ouvrir la tente de toit et récupérer nos sacs de couchage. Il est grand temps ! Ce soir, enfin, on dormira vraiment au chaud !
Lundi 11 mars
Ce matin…
… la météo est in-cro-ya-ble ! Après la tempête de la veille, c’est donc sous un ciel bleu sans nuage que l’on s’élance sur la route du parc national Patagonia, côté argentin cette fois. Durant la tempête de la veille, il a bien neigé dans les hauteurs et les sommets, maintenant bien visibles, sont auréolés de neige. Comme c’est beau ! On a même la chance de croiser un jeune condor posé en bord de route et qui s’envole laborieusement à notre approche.
Après 2 heures de piste, on quitte le parc Patagonia et on arrive au petit village de Lago Posadas. C’est très mignon mais très désert. On trouve quand même une station-service. Le pompiste ne prend pas la carte, alors on y laisse nos 30 000 derniers pesos argentins (30 €) pour faire un petit complément de plein. Entre faire le plein ou manger, on a fait notre choix 😆
Le plan maintenant est de rejoindre le prochain parc national en empruntant la Ruta 41, une piste 4×4 de 80 kilomètres qui permet de couper par les montagnes plutôt que de faire le tour par la route. On a ouï dire que la piste pouvait être délicate, voire technique. On passe donc à l’office du tourisme pour demander des informations. Au début, elle ne semble pas comprendre de quelle piste on parle et nous oriente plutôt sur les promenades du coin. « Mais si, la piste dans les montagnes ! ». Ah ! Oui, mais non, c’est seulement pour les 4×4. Ça tombe bien, on a un 4×4 😉. Elle glisse un regard vers le Jeep. Vous êtes sûrs de votre 4×4 ? Bah oui, Jeepy, c’est le best ! Elle hausse les épaules et consent à nous laisser partir, non sans nous prévenir : on s’y engage « à nos risques et périls ». Ça promet !
On fait une petite pause déjeuné au bord du lac Posadas avant de s’engager sur la piste…
Puis, c’est parti !
Après avoir contourné le lac, des lacets serrés nous font prendre de la hauteur.
Un virage de plus et le lac disparaît. On est maintenant dans les montagnes, au milieu des prairies et des pâturages. On croise quelques gauchos, les cowboys argentins, toujours à cheval et toujours accompagnés d’une horde de chiens et d’un troupeau de vaches. Ce sont les dernières personnes que l’on croise de la journée !
La piste nous emmène ensuite à travers des paysages à couper le souffle. De vastes pâturages, des montagnes enneigées, des vallées escarpées, des pics rocheux, des vaches et des guanacos.
Régulièrement, des portails bringuebalants nous barrent la route, gardant l’accès à de vastes propriétés. À chaque fois, il faut sortir de la voiture pour ouvrir puis refermer derrière nous.
On franchit des ruisseaux…
Puis la piste se fait plus technique. On roule maintenant sur de la grosse roche, le Jeep balance dans tous les sens.
Ça se complique encore avec l’apparition de la neige. Nous sommes début mars, mais les premières neiges sont déjà tombée en terre patagonne ! Au début, on est en mode : « Oh, de la neige ! » 😃. Ça nous rappelle nos excursions hivernales au Québec, quand on allait faire de la trail et camper par -30°C. La belle époque 😆. On adore ! Mais au bout de quelques kilomètres, il y a de plus en plus de neige et on commence à se demander si la saison n’est pas trop avancée pour ce genre d’aventure… Heureusement, la neige, aussi molle et profonde soit-elle, ne pose aucun problème au 4×4 et on continue d’avancer, même si les roues arrière perdent parfois toute adhérence et que l’on sent l’arrière du Jeep glisser sur la neige.
On passe un col et vient l’heure de la descente. La piste est en dévers, elle penche côté vide. Certains passages deviennent périlleux. On coupe la radio.
Tout à coup, la piste penche dangereusement côté vide. D’un côté, la neige molle sur laquelle on glisse, de l’autre côté, le bord meuble de la piste qui menace à chaque seconde de se dérober sous nos roues. L’arrière du Jeep glisse. Le précipite nous semble tout à coup immense et sans fond. Et si on basculait ? Mais Rémi fait preuve d’un sang froid à toute épreuve, tandis que je suis prise de sueurs froides sur le siège passager. Il s’agrippe au volant, je m’agrippe au tableau de bord. Doucement. De toute façon, on ne peut plus faire demi-tour. Mètre par mètre, on franchit le passage dangereux jusqu’à ce que la piste se rétablisse. On est sauvés ! 🥵 Et on a eu très peur !
On reprend la piste tranquillement, un peu effrayés par la suite, mais heureusement, il n’y a plus aucun passage périlleux de ce genre. On redescend lentement mais sûrement jusque dans la vallée, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de neige. Le temps s’est couvert dans l’après-midi. Un vent glacial souffle maintenant sur les plaines. Peu avant la fin de la piste, on décide de s’arrêter sur un coin d’herbe pour passer la nuit.
Bilan de la journée sur la Ruta 41 : 4 h 30 pour parcourir 80 kilomètres, une piste défoncée, de la neige, des paysages argentins incroyables, des dizaines de guanacos, 0 puma et la plus grosse frayeur du voyage. Mais on n’a pas fait tout ça pour rien ! En effet, la piste nous a menés jusqu’au parc national Perito Moreno, un des lieux préférés de notre voyage à travers les Amériques !
1 commentaire
Ça craint cette route 41…. Malgré de très beaux paysages, ce passage « sueur de la peur » 😉 était vraiment très dangereux… Bravo au conducteur !
Bisou.