On brave les feux de forêt pour suivre la trace des chercheurs d’or à travers le Yukon, jusqu’à Dawson City, berceau de la ruée vers l’or.
Mercredi 06 juillet 2022
Bienvenue à Whitehorse, la capitale du Yukon, et aussi la plus grande ville au Nord du Canada. Près de 26 000 habitants y vivent, ce qui représente environ 75 % de toute la population du Yukon ! Nous sommes bien contents d’y être en été, car on n’ose même pas imaginer les hivers qu’ils doivent endurer, si au Nord 😅 Pour l’heure, il fait beau, il fait chaud, tout est vert et beau.
La ville est en émoi : il n’y a plus internet. C’est bien notre veine ! Après 5 jours sur la route, nous avons du travail à rattraper. Cette panne générale serait due aux incendies, plus au Nord, qui auraient brûlé des câbles. Tout est HS. Nous faisons la queue à la banque, avec toute la ville, pour retirer un peu de cash, car plus aucune machine ne fonctionne dans les magasins et JP doit passer au garage pour une vidange. Puis, nous nous installons au Tim et tentons de grappiller un peu de bande passante pour travailler. C’est pas gagné…
Le soir venu, nous commandons une pizza, que nous mangeons près d’un barrage, aux abords de la ville. Il fait particulièrement bon. Avant de nous coucher, nous assistons à un magnifique coucher de soleil : il est 23 heures.
Jeudi 07 juillet
Bonne nouvelle : Internet est revenu ! Comme la veille, mais la galère du réseau en moins, nous passons la journée chez Tim, de 8 heures à 19 heures. Puis, nous passons faire les courses, faire le plein (y compris nos deux réservoirs de 20 L chacun) et prendre quelques renseignements à l’office de tourisme. Des feux sévissent toujours sur la route, certaines portions sont fermées. À 22 heures, nous passons récupérer un plat au restaurant chinois avant de retourner dormir au même endroit que la veille.
Vendredi 08 juillet
Nous passons la matinée à déambuler dans Whitehorse, avec ses rues aux vieux bâtiments d’époque, typiques de la ruée vers l’or. Le contraste entre les vieux bâtiments parfaitement conservés et la modernité de la ville est assez comique : un Sport Expert dans un bâtiment d’époque, de vieilles fresques représentant des scènes de la ruée vers l’or, de vieux horodateurs, de jolies maisons d’époque encore habitées. On tombe sous le charme du cinéma de la ville, conservé… dans son jus. On adore !
À l’entrée de la ville trône le SS Klondike II. Cet immense bateau construit en 1937, après que le SS Klondike ait coulé, faisait la liaison entre Whitehorse et Dawson City, à près de 800 kms plus au Nord, jusqu’en 1955. Les marchandises et les passagers arrivaient à Whitehorse par le train. Mais, arrivés à Whitehorse, il n’y avait plus ni chemin de fer ni route pour monter au Nord. Le bateau était la seule solution : un périple dangereux le long de la rivière Yukon et de ses rapides.
Nous terminons notre découverte de Whitehorse par le canyon.
Aujourd’hui, ce n’est pas en bateau que nous comptons rejoindre Dawson City, mais par la Klondike Highway. Le GPS indique 6 heures de route. Mais ça, c’est sans compter les incendies. Après 2 heures de route, nous sommes bloqués à Pelly Crossing, une bourgade bien paumée. Comme on s’y attendait, la route est fermée et personne ne sait quand elle rouvrira. Cela peut être ce soir… ou demain. Nous décidons de patienter. Pas question de retourner à Whitehorse et de faire un large détour par… l’Alaska.
Heureusement, nous ne sommes pas seuls : nos amis allemands rencontrés sur la route sont là pour nous tenir compagnie. Ils reviennent d’Alaska et de la Dempster Highway et ont plein de conseils à nous donner. Pas que des conseils, d’ailleurs ! Leur voyage dans l’Ouest touche à sa fin et ils nous offrent certaines de leurs affaires dont ils n’ont plus besoin. Nous rencontrons également Alex, un chauffeur de camion. Les fameux chauffeurs qui roulent à 110 km/h sur les petites routes limitées à 90 et qui doublent comme des malades. Alex adore notre Jeep et nous invite à passer quelques jours sur son île, près de Toronto ! Un jour, peut-être 😉 Il voyage avec son fils et, à eux deux, ils roulent 24h/24h. Pendant que l’un dort, l’autre conduit. Ils font cela tout l’été. Nous sommes vendredi et ils partent faire la Dempster (depuis Edmonton, soit 3200 kms !) pour… la troisième fois !! 😲
Nous patientons depuis 3 heures quand une voiture s’arrête : la route ouvre dans 5 minutes. Branle-bas de combat ! Pas question de rater le convoi, car c’est probablement le dernier de la journée. Alex, pourtant très bavard, disparaît en moins de dix secondes. Nous plions bagage et c’est parti ! La voiture pilote devant, la voiture balai derrière. Nous sommes un convoi d’une trentaine de véhicules. Les premiers kilomètres, tout va bien. Puis, nous approchons de l’incendie : beaucoup de fumée, visibilité réduite, les arbres sont brûlés sur les bas-côtés et nous voyons même quelques foyers encore fumants. C’est une ambiance apocalyptique.
Au bout de 60 kms, nous arrivons à la fin de la zone d’incendie et le convoi se disperse. Il y a toujours beaucoup de fumée. Impossible de passer la nuit dans le coin. Nous décidons de continuer jusqu’à Dawson City pour dormir en sécurité. La route est longue et parsemée de portions en travaux où nous roulons sur de la terre. La poussière s’ajoute à la fumée, on n’y voit pas grande chose. Nous prenons un repas bien équilibré dans la voiture (chips, cacahuètes et cookies).
Nous arrivons à Dawson City à 18 heures minuit et demi. On perd la notion du temps avec ce jour qui ne se couche jamais ! 😀 Une bière avec nos amis allemands et au lit ! Les amis, merci encore pour ces quelques heures et cette soirée passées ensemble. Merci infiniment pour tout ce que vous nous avez généreusement donné : le Milepost a trouvé sa place dans notre cockpit de pilotage et il nous a bien servi sur la Dempster. Le poisson était absolument délicieux ! Et on compte bien trouver quelques pépites d’or grâce à vos poêles d’orpailleur ! Merci aussi infiniment pour l’America Beautiful Pass ! On va en faire bel usage 😊
Samedi 09 juillet
En 1896, de l’or est découvert dans la rivière Klondike. Aussitôt, des chercheurs d’or du monde entier ont débarqué, chassé les premières nations qui vivaient ici depuis toujours et développé la ville de Dawson City. Quelques années plus tard, tous sont repartis, riches ou bredouille, laissant derrière eux des paysages retournés et une ville presque désertée. En faisant le tour de la ville, on imagine sans peine la vie de ces hommes et de ces femmes dans ce coin si hostile, et des hivers glaciaux qu’ils devaient endurer. Lorsque Dawson City s’est fait « voler » son titre de capitale du Yukon au profit de Whitehorse en 1953, le gouvernement a fait construire une route entre les deux villes, pour apaiser la colère des habitants. C’est ainsi qu’on peut maintenant y accéder par la route ! Aujourd’hui, la ville compte 1 800 habitants et survit grâce au tourisme.
Une visite guidée nous permet de visiter les lieux les plus emblématiques de la ville de l’époque et d’en apprendre plus sur la vie des chercheurs d’or. La banque de Dawson City, où on venait peser son or et l’échanger contre de la vraie monnaie :
Un saloon à l’ambiance très feutrée. Les miroirs au bas du comptoir permettaient aux messieurs de tenter d’apercevoir les chevilles des dames.
Le bureau de poste
Le village abandonné de Bear Creek possède une soixantaine de bâtiments, laissés à l’abandon du jour au lendemain, quand l’activité de l’or n’a plus été rentable. Dans les différentes bâtisses, on trouve des centaines de dossiers d’archives. Des bureaux encore remplis de dossiers et d’objets divers, des calendriers datant de 1966, des plannings de travail avec les noms des anciens ouvriers et des commentaires, de vieilles cartes cartographiant les différents ruisseaux d’or de la région. Ce village a été en opération des années 1900 à 1966, après la ruée vers l’or. Il était exploité par des entreprises privées. Elles employaient de jeunes ouvriers qui travaillaient sur des shifts de 12 heures dans les mines.
On apprend le processus utilisé pour forger des lingots d’or : la terre était passée manuellement au tamis, l’or extrait était ensuite séché, puis fondu dans un énorme four à huile. L’or fondu était coulé dans des moules en forme de lingots puis entreposé dans des coffres-forts géants, avant d’être envoyé en ville et vendu à la banque.
Sur la route, nous découvrons une immense drague, posée dans un lit de rivière asséché. Au plus fort de la production, elle épurait jusqu’à 23 kg d’or en 3 à 4 jours ! D’énormes godets d’excavation en fer raclaient le fond de la rivière pour en extraire des tonnes de terre et de gravats, qui étaient ensuite passés au tamis. Ce qu’il en restait était envoyé à Bear Creek où on extrayait l’or de la terre. En près de 50 ans d’exploitation, la drague a extrait 8 500 kg d’or et 49 millions de mètres cubes de gravier. Au temps pour l’environnement
La question se pose aussi de nos jours. Sur les montagnes et près des rivières et ruisseaux, on voit encore d’énormes engins qui retournent des quantités astronomiques de terre. La production n’est certes plus ce qu’elle était il y a 60 ans, mais quand on voit la façon dont la montagne est creusée et la terre retournée, ça fait mal au cœur. Dawson City est particulièrement jolie, mais les alentours, c’est autre chose ! D’immenses gisements de graviers et de terre ont été retournés. Il y en a partout ! Tout est creusé, retourné, fouillé, laissé à l’abandon : de vieilles machines rouillées. Des caravanes abandonnées. Des ruines. De vieux outils. Tout témoigne de l’ancienne activité de la ville.
On tente notre chance dans le ruisseau Eldorado (nom prometteur), où un petit endroit est mis à disposition des touristes pour chercher de l’or. En effet, pas question de chercher de l’or dans le premier ruisseau venu ! Chaque parcelle de terrain appartient à un prospecteur, et gare à celui qui s’amuse à chercher de l’or chez le voisin ! Dans cette concession ouverte au public, quelques règles sont en vigueur : théoriquement, on n’a pas le droit de venir chercher de l’or plus de 3 fois par saison et on ne peut utiliser que du matériel rudimentaire : une pelle, un tamis et une batée. Bon nous, on ne risque pas de trouver grand chose : on manque clairement d’expérience et de technique 😅 C’est pas aujourd’hui qu’on va s’enrichir !
Le plein d’eau ? Check ! Le plein d’essence ? Check ! Le plein des deux réservoirs d’essence sur le toit ? Check ! Le plein de nourriture ? Check ! Les garde-boue arrière retirés ? Check ! Les pneus dégonflés ? Check ! Les grilles d’aération retirées ? Check ! Un tour du Jeep pour s’assurer que tout est ok ? Check ! Nous sommes ready, JP est ready. On peut y aller !
3 comments
Superbe récit et magnifiques photos! Ça nous rappelle cette magnifique route sur laquelle nous nous sommes croisés à quelques reprises. Bonne continuation!
Simon et Juliette
Merci beaucoup pour votre message ! Ca nous fait plaisir de vous retrouver par ici ! 🙂 On vous fera une petite dédicace sur l’article sur la Dempster ! 😉
Ah, mais j’espère bien! ☺️